Pourquoi accepte t-on et encourage-t-on les méthodes trompeuses de la RATP et de ses contrôleurs, en France ?
Une nouvelle pour un coup de gueule
20h14 le 17 juin, Châtelet les Halles, Paris – France
Il fouille dans sa poche droite, l’habituelle… Rien ! Paul se rend compte qu’il a oublié ou perdu son pass navigo. Malgré son hésitation palpable à frauder (il l’a tellement fait), il sait pertinemment qu’il y a de très nombreux contrôleurs à la station Châtelet. Il se résout donc à aller acheter un ticket, raisonné aussi par son amie qui ne le connait que trop bien. 5 minutes de queue, 5 minutes de perdues pour un titre de transport cher et inutile qui vient doubler celui qu’il paie déjà. Il peste. Mais finit par obtenir son sésame, sans le reçu qu’il a pourtant demandé. Passons.
Retour aux bornes de validation. Il insère le ticket qui lui revient dans un bruit désagréable, tandis que les portes devant lui restent désespérément closes. Il retente. Même résultat. Le destin est parfois cruel, la machine et le ticket lui font faux bond. Paul jette un œil à la queue qu’il vient de quitter. Et finit par choisir de passer derrière son amie. Ah non, une borne est ouverte, bloquée. « Rien ne fonctionne à la RATP ! », pense-t-il amèrement. Il voit une personne, puis deux, se faufiler sans mauvaises surprises. Il leur emboîte le pas. Quand vient son tour, les deux portes caoutchoutées se referment sur ses épaules… Aïe ! Décidément, un mauvais jour.
Et paf ! Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, des contrôleurs sortent de leur astucieuse cachette et le cernent une fois passé ce seuil fatidique. « Monsieur, venez avec nous s’il-vous-plaît ! »
Comprenez : « Veuillez venir vous cacher avec nous, sinon pendant les 5 minutes nécessaires à vous mettre l’amende, les autres fraudeurs ne se feront pas prendre à notre piège ! »
Confiant malgré tout car honnête, Paul sort son titre de transport fraîchement acheté et l’agite au nez du contrôleur féminin qui s’adresse à lui sans exagérer les politesses, comprenez, très sèchement.
« Votre titre de transport n’est pas validé ! »
-VOTRE machine ne me l’a pas validé !
-Comment voulez-vous que je vous croie ? Qui me dit que ce n’est pas un ticket que vous avez toujours avec vous et une excuse que vous balancez à chaque fois que vous vous faites contrôler ?
-Comment voulez-vous que je vous le prouve ? Qui me dit que la RATP ne fait pas dysfonctionner certains rouages de son système volontairement afin de piéger d’honnêtes – et de moins honnêtes – passagers comme moi ? »
Il explique la situation. Le pass navigo déjà payé à l’année, le ticket tout neuf qui double sa note, la machine qui ne marche pas, la solution de dernier recours. Elle n’en a cure. Il a fraudé. Il doit payer. Système binaire. Il se défend comme il sait si bien le faire, sans élever le ton mais en mettant son interlocuteur face à ses contradictions.
La contrôleuse ne bronche pas. Ça fera 45 euros sur place, et 70 euros et des brindilles s’il ne paie pas de suite. Les frais de dossiers qu’elle lui dit. Il a beau argumenter, sourire, expliquer qu’il a tous les justificatifs du monde, il n’y a rien à faire contre la mauvaise foi et contre l’argument ultime qui se dresse comme un flic qui fait le guet : « Si vous n’êtes pas d’accord, Monsieur, on appelle la Police, vous verrez cela avec elle… » Héroïque !
Il capitule, donne ses données personnelles comme il vendrait son âme, prend son amende et part en maugréant. Ce n’est pas la première fois qu’il a affaire aux contrôleurs de la RATP, oh non ! Il sait que c’est plus simple de convaincre une porte de prison que ces employés en uniformes. Il sait qu’il n’a pas forcément la tête de l’emploi. Que son ton faussement désinvolte ne l’aide pas beaucoup. Mais Paul ne supporte plus ce métier, l’un des plus injustes de France. Un métier détesté, certes, mais comment pourrait-il en être autrement ? Il se demande bien comment des gens en arrivent-ils à choisir de devenir des « raketteurs de pauvres » ?
Il ne comprend pas. Il se torture l’esprit pourtant. Ce n’est pas la première fois qu’il subit ce genre d’épreuves.
En France comme ailleurs, les bornes de validation des stations de métro sont de véritables seuils de pauvreté ! Sauf qu’ailleurs, ou du moins dans la majorité des pays que Paul a visité, les contrôleurs sont placés au niveau des bornes de validation, bien en évidence. La fraude n’a donc pas lieu, ou rarement. c’est un système de prévention, et non de répression. Cela paraît tellement plus intelligent et humain…
De la même manière, à l’étranger, il n’a jamais remarqué cette singularité française consistant à se cacher pour surprendre les fraudeurs. Une méthode de voleur de grand chemin à l’époque médiévale. Dieux, que les temps ne changent pas…
Conclusion : La France des transports en commun a choisi la voie de la répression plutôt que celle de la prévention. Une répression qui est souvent doublée d’une vraie tromperie. La plupart des contrôleurs se cachent au détour d’un couloir, derrière des glaces sans teint ou à l’abri d’un poteau. Souvent, un seul agent (en civil, avec un petit brassard orange au bras que son possesseur réussit astucieusement à cacher en s’appuyant de la bonne épaule contre le mur) reste à vue, afin qu’on ne puisse pas les accuser de tricher… Quand bien même !
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On subit un système tellement lâche que le borgne voudrait s’en crever l’œil. Si le but de la RATP était que tout le monde soit en règle, pourquoi ne pas placer des contrôleurs au niveau des tourniquets, comme avant ? Les amendes sont plus fructueuses que les tickets (aux prix déjà excessifs), n’est-ce pas ?
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Compassion, empathie ? Pourquoi faire ? Entrer dans l’uniforme, c’est entrer dans le moule mais par la grande porte : car on se place du côté de celui qui dicte les règles du jeu. Du côté de celui qui contrôle le game. Peu importe si la manière est indigne, et si les conséquences sociales sont violentes.
« Mieux vaut prévenir que guérir » disait la maxime. Il est humain de ne pas être naturellement enclin à guérir un malade qui a déjà tué. Mais de savoir qu’on aurait pu le guérir avant pour qu’il ne tue jamais… Insupportable idée. Questionner le bien-fondé de ses actions dans la société est un acte fondamental de vivre-ensemble et j’invite chaque individu à le faire à son échelle.
Les ordres existeront toujours. Si seulement il n’y avait personne pour les mettre à exécution… Les maîtres sont si lâches !
Les contrôleurs n’ont absolument aucun droit si ce n’est de relever votre identité si vous êtes assez bête pour la leur donner. Seule la police a le droit de vous forcer à présenter un justificatif d’identité.
Et s’ils ne sont pas présents sur les lieux, généralement ils ne se déplaceront pas ou rarement, j’ose espérer qu’ils ont d’autres chats à fouetter. Cela dit, rien ne vous oblige non plus à les attendre !
Les contrôleurs n’ont pas le droit de vous retenir, de vous toucher, d’empêcher un train ou un bus de partir, de vous forcer à descendre.
Bref des gens qui font leur boulot, je pense pas que ce soit un kif pour eux non plus, connaissez simplement vos droits.
Le jour où la RATP paiera des impôts, j’envisagerai peut-être de revoir ma position.
PS : je taffe et j’ai un navigo année payé à hauteur de 50% par ma boîte mais trouve anormal que des gens dans le besoin se fassent attraper.
J’en sais quelque chose pour avoir été en irrégularité un paquet d’années, puis pour refuser de payer (par principe) la nouvelle super amende quand tu ne valides pas ton titre que tu paies pourtant.
Et s’ils n’ont pas le droit de retenir les gens, il me semble qu’il y a une faille. Ils sont autorisés à « maitriser » une personne qui les pousse ou les bouscules (selon la très fameuse loi du « c’est toi qui a commencé).
Du coup, ce n’est pas si facile !
Mais il n’empêche : les pratiques encouragées dans cette boîte qu’est la RATP sont odieuses, autant que les quotas du côté du ministère de l’Intérieur.